vendredi 15 juin 2007

Comment et pourquoi j'ai choisi la peinture.

Pendant le film, Mary à tout prix, sortie le 11 novembre 1998 lorsque Ted, joué par l'acteur Ben Stiller, à peu près, a dit :" Je suis écrivain car c'est un métier que je peux exercer partout où je pourrai être avec la femme de ma vie."
Après ce cinéma, la tête jeune de vingt années et encore dans les nuages, j'ai réfléchi à cette phrase, puis à devenir un écrivain. Ecrire des livres en français alors que j'ai des lacunes de vocabulaire dû à mon arrivée tardive en France, en 92 exactement, à ce moment là je savais dire "bonjour, merci", ce n'est pas possible, pas avec ma tronche de niak. En revanche j'ai toujours dessiné, je crois avoir une chance de travailler en tant que dessinateur, illustrateur ou peintre.
Dans cet enjeu, il y a la femme et aussi ma liberté, cette dernière je l'ai compris que plus tard quand la femme est partie avec la télé. Alors j'ai arrêté mes études supérieures, mon premier refus envers l'enseignement, la fin d'une fausse docilité et d'une obéissance aveugle. A cet effet, venait le refus du travail des bureaux d'études, et de méthodes de conceptions mécaniques. Je suis allé voir et espérer à la faculté d'histoire de l'art et j'ai encore abandonné quand mes maîtres de stages et de travail au musée comptemporain m'ont dit que je ne serais considéré comme jeune artiste qu'à l'âge de trente ans. Ainsi j'ai commencé à travailler dans les salles de jeux pour être indépendant et avec soin j'ai cramé ma jeunesse comme il se doit, pour ne pas être gris à force de broyer du noir.
A présent, approchant de la trentaine je sors de l'ombre, en montrant un peu plus le projet que j'ai nourrit et mené dans mon coin. Je suis autodidacte et la peinture n'est pas ma passion, elle est simplement le travail qui me permettrait, peut-être, de vivre à l'écart de ce monde et continuer à refuser de servir le progrès et la course à l'industrie en négligeant l'être humain. Ressentir la souffrance est tragique, en rire de la souffrance la rendre comique, vivre et lutter tant que la force est encore là est une épopée.
La technologie et les belles inventions, au lieu de servir l'humanité à progresser et à communiquer, a créé une nouvelle forme d'esclavage, le miroir dans lequel l'homme croit voir son reflet et ses rêves de grandeur. Les esclaves des Amériques ont inventé le blues pour communiquer et les maîtres ont imité pour se moquer de ces pauvres. Les chaînes abstraites de notre temps sont là, l'antidépresseur a remplacé la drogue que l'on donne au mineur, les pauvres créent et travaillent, les millionaires achètent et collectionnent pour les générations à venir, mais si on fait le calcul sur trente ans de carrière on a gagné le million rêvé, le compte était bon en franc.
Mon professeur d'Histoire du lycée, un fier breton, amateur de whisky m'a appris à aimer plus cet alcool que ses cours, il m'a aussi appris une autre chose, le travail c'est notre liberté disait-il. Cet autre professeur de qualité, qui au premier cours a fait remplir un questionaire sur le besoin, les vingt-quatre garçons de la vingtaine ont tout mis sauf le sexe et pourtant il est le quatrième besoin dont on s'efforce tant à sacraliser pour le rendre négatif en montrant des illusions à la jeunesse. Nicole Kidmann a si bien dit à la fin de Eyes Wild Shut de Stanley Kubrik:"fuck."
Dans le cybercafé où je travaille actuellement, je vois toute sorte d'hommes de classe et de métiers différents, certains résignés à être père et tentent de le faire au mieux mais ils ressentent toujours l'envie de jouer encore avec les copains, d'autres viennent car ils se sentent libres d'être eux-même, il y a aussi les assistés, les désespérés qui ont perdu l'espoir pour l'instant et les vieux mauvais garçons trop vieux à présent pour être mauvais, et ceux de la vingtaine qui ont besoin d'entendre sans arrêt "Va trouver un boulot" pour se décider enfin par eux-même d'être responsable. Enfin il y a les sauvages assagis, les marginaux lucides qui ont encore un sens de l'honneur et qui ose le respecter.
Cela dure et je continue ma besogne dans ce cybercafé en tant qu'employé pour garder l'âme de cette salle comme l'a laissé l'ancien gérant qui avait aussi un autre métier, celui d'éducateur. Puis j'ai découvert les rares lieux où la vraie convivialité est là. Cette découverte me rassure quelque peu à propos de cette ville, perpétuellement en évolution, que j'ai choisi, je veux qu'elle soit ma deuxième ville natale. D'ici je vais me servir des couleurs, des formes et des symboles pour montrer du doigt l'image digne du dieu dégénéré à l'esprit humain. Le secret, Edgar Poe m'a appris comment cacher un secret avant de mourir misérablement dans une rue, pour ceux qui sont intelligent il suffit de le mettre en évidence car ils chercheront toujours une réponse ailleurs et le tout est révélé pour clore. Nous sommes tous intelligents, c'est notre aptitude à observer, déduire, relier et choisir.
De la brume au fil qui nous relient, je dessine et prépare mon dessein pour mériter les seuls biens qui me restent. Tu, dung un prénom double qui signifie charmant et courageux que j'ai conservé en refusant la facilité de prononciation de Damien ou Joseph, j'ai réajusté le tout avec un troisième mot pour me définir, la Foi, celle que j'ai perdu très tôt puis retrouvé grâce aux nombreuses crises par une surconsommation du café. Je peux vous dire, à présent, avec assurance que ma peinture, mes couleurs ne sont pas un message de colère, ni d'oppression mais ce sentiment d'exister libre, à la fin de l'acte. A force de répétition, cette forme en V que vous voyez parfois comme nos ailes abstraites est aussi les deux simples traits qui représentent notre beau sourire.